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L’Évangile de la femme de Jésus

589554564C’est un petit papyrus de la taille d’une carte de visite, couvert d’une écriture dense et plutôt rustique en langue copte.
 
Très endommagé, il aurait pu être classé parmi les nombreux fragments d’anciens rouleaux de papyrus intéressants sur un plan académique mais sans grande importance.
 
Mais les experts considèrent que les quelques mots que l’on peut lire dans les lignes incomplètes du papyrus, qui transcrivent une conversation qu’aurait eu Jésus avec ses disciples, pourrait ébranler l’image que donnent du Christ les quatre Évangiles canoniques.
 
« L’Évangile de la femme de Jésus », comme on appelle ce papyrus depuis sa découverte il y a deux ans, fait dire « ma femme » à Jésus, et mentionne une certaine Marie comme disciple. Cette semaine, l’analyse a montré que le papyrus n’était pas un faux réalisé tardivement, mais qu’il datait d’une période qui s’étend du VIe au IXe siècle de notre ère.
 
Ce n’est certes pas le premier – ni sûrement le dernier – récit ou fragment évangélique apocryphe, ou du moins non canonique, que l’on découvre, mais le monde des exégètes s’enflamme, notamment dans la sphère protestante.
 
Le professeur Hal Taussig, expert en Nouveau Testament qui a travaillé à l’authentification du fragment, pense que son contenu est « à couper le souffle » parce qu’il laisse croire que Marie Madeleine a été « un des principaux meneurs du premier mouvement christique ».
 
Cette semaine, la Revue Théologique de Harvard a publié plusieurs résultats des deux années d’études que vient de subir le papyrus. Karen King, titulaire de la chaire Hollis de Divinité à l’Université Harvard de Divinité et qui avait annoncé la découverte du fragment en 2012, estime que ce texte ne prouve pas du tout que Jésus ait été marié.
 
Elle explique : « Le thème principal du fragment est d’affirmer que les femmes qui sont des épouses et des mères peuvent être disciples de Jésus – un sujet qui a fait l’objet d’intenses débats au début de la Chrétienté alors que le célibat abstinent s’imposait comme modèle. Ce fragment évangélique incite à remettre en question ce que nous pensions savoir sur l’importance historique qu’a eue le statut marital de Jésus dans les controverses entre premiers Chrétiens au sujet du mariage, du célibat et de la famille. »

Gospel of Jesus Wife  
Selon les résultats des analyses scientifiques publiées cette semaine, rien ne prouve que le papyrus soit une contrefaçon ou un faux réalisé à l’époque moderne.
 
Selon la Revue Théologique de Harvard, « Après la conclusion de toutes les recherches, Mme King a pris en compte toutes les preuves sur l’âge et les caractéristiques du papyrus, de son encre, de son écriture manuscrite, de la langue dans laquelle il a été écrit et de son contexte historique. Elle en est arrivée à la conclusion qu’il s’agit certainement de l’œuvre de premiers Chrétiens, et pas celle d’un faussaire moderne. »
 
On ne sait évidemment pas qui a pu écrire, six à neuf siècles après la mort du Christ, ce fragment de papyrus (qui ne fait que 45mm x 78mm) sur lequel Jésus évoque sa mère, sa femme et une disciple appelée Marie. Une des seules choses qui semblent acquises est qu’il vient d’Égypte puisqu’il est écrit en copte.
 
D’aucuns espèrent probablement que ce petit bout de papyrus suffira à ébranler la vision canonique vaticane de la vie du Christ – quoi ? Jésus marié et prenant une femme comme disciple ? Ils se bercent sûrement d’illusions, tant Rome compte (et a compté au fil des siècles) d’experts en exégète paléochrétienne qui ont conforté la tradition catholique.
 
Il n’empêche : au-delà de la polémique stérile, ce fragment de papyrus montre que, à la charnière entre l’Antiquité et le premier Moyen-Âge, la femme prenait une part active à l’essor du Christianisme.

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